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  • par Anouk Jeanneau modifiée le 13 novembre 2024 17:20

    Envisager la dépollution du sol par les plantes

    La phytoremédiation est une alternative moins chère que les techniques classiques et bénéfique sur le plan environnemental pour traiter certains sites pollués.
    En résumé

    Cette fiche propose quelques repères et ressources pour évaluer l’opportunité de la reconversion d’une friche par des techniques de phytoremédiation : types de friches privilégiées, étapes clefs, chiffres et exemples.

    🚀 L’APPUI PROPOSÉ

    Le principe des technologies dites de “phytoremédiation” consiste à utiliser des plantes pour réhabiliter un sol contaminé. Certaines plantes sont en effet capables de fixer, dégrader ou accumuler des polluants présentant des similitudes atomiques ou moléculaires avec les nutriments nécessaires à leur croissance.

    Ces techniques sont a priori plus conformes aux enjeux de développement durable que les techniques classiques telles que l’excavation mais elles restent encore peu utilisées, malgré des expérimentations qui se développent depuis plusieurs années.

    🧐 Quel type de friche ?

    • Situation du site : la phytoremédiation peut être utilisée en milieu rural comme urbain et ne nécessite pas de ressources spécifiques, excepté un ensoleillement, un apport en eau et une qualité des sols propices au développement de végétaux. Il est en revanche recommandé un accès facile pour l’entretien des plantes.

    • Taille du site : cette technique est plutôt adaptée aux sites de grande taille d’un point de vue économique, mais des terrains plus petits peuvent également être propices à l'expérimentation.

    • Calendrier : ces solutions de gestion de la pollution prennent du temps (de 2 à 20 ans en fonction des traitements) et peuvent donc être déployées dans des contextes où la durée du traitement n’est pas une contrainte, c’est-à-dire que ne nécessitent pas une remise en état rapide.

    • Compatibilité avec un bâti : le site doit pouvoir être planté ou ensemencé, et donc être au préalable démoli et désimperméabilisé. Il peut cependant être envisagé des méthodes de phytoremédiation sur seulement une partie du site, en fonction du projet futur.

    • Type de pollution : les phytotechnologies ne sont pas adaptées à tous les sols pollués, il est nécessaire de disposer d’un diagnostic sur la nature des polluants présents sur le site. Elles s’appliquent essentiellement sur les sols de subsurface silteux à sableux jusqu’à 50 cm de profondeur lorsque les surfaces polluées sont importantes (au-delà, il est préférable d’utiliser des arbres ou d’excaver les terres). Les polluants les plus couramment traités par phytoremédiation sont les métaux/métalloïdes. Des traitements sur les autres substances inorganiques (fertilisants, nitrates) ainsi que sur des substances organiques (hydrocarbures, phénols, pesticides et herbicides, COV, COHV, SCOV, SCOHV, TNT et certains produits pyrotechniques) sont possibles. Il peut s’avérer pertinent, en fonction des polluants, de gérer de manière différenciée une zone du site avec une technique et une autre partie du site avec un procédé différent, potentiellement en complément des techniques conventionnelles.

    🧮 Quelques chiffres :

    • Durée de traitement : 2 à 20 ans

    • Coût de la phytoextraction (hors apport de terre végétale) : 18 à 40 €/m2

    • Coût de la phytostabilisation extraction : 2 à 12 €/m2

    ⚙️ Les étapes clefs :

    Plusieurs études sont à mener en parallèle pour valider la faisabilité de la phytoremédiation en fonction des caractéristiques du site :

    • Diagnostic pollution et définition des objectifs à atteindre en termes d’exposition résiduelle ou de concentration résiduelle en polluants acceptable pour l’usage envisagé du site.

    • Études des caractéristiques agronomiques du terrain : sols ; pH ; topographie ; conditions météorologiques, etc.

    • Bilan coût/avantages. A noter que sur foncier non convoité, riche en biodiversité, sans risque de transfert, les processus « naturels » déjà en place peuvent suffire. Dans ce cas, la démarche peut consister à « laisser faire » et suivre l’évolution du site et des polluants. Il est donc intéressant d’analyser l’intérêt et le risque d’une non-intervention.

    • Avant la mise en œuvre de la ou des techniques choisies, il est recommandé de réaliser des essais de validation de la faisabilité technique.

    La phase travaux s’articule comme suit :

    • Préparation du site (défrichement, démolition...)
    • Sélection des espèces végétales et des amendements éventuels
    • Semis et plantations
    • Entretien
    • Récolte et valorisation de la biomasse
    • Suivi, surveillance voire animation du site

    🧪 Des exemples d’expérimentations :

    Une expérience est menée par les chercheurs de l’Université de Lorraine à Uckange, sur l’ancienne friche industrielle U4 pour le traitement de métaux par phytoextraction. Des éléments complémentaires dans cet article et sur le site internet du lieu.

    A Bordeaux, la plantation de 450 arbres doit permettre via la phytoremédiation de dépolluer un site contaminé aux métaux lourds par une ancienne décharge, tel que décrit dans cet article.

    A Homécourt (Meurthe-et-Moselle), sur le site de l'ancienne cokerie, des chercheurs du Gisfi étudient la pollution des sols et les solutions pour les traiter, notamment la phytoremédiation. Plus d’infos ici.

    MisChar est une expérimentation menée dans les Hauts de France par un consortium d’acteurs et soutenue par l’ADEME dans le cadre d’un appel à projets. Le projet évalue l’intérêt d’un charbon végétal (biochar) comme amendement pour restaurer la fonctionnalité des sols affectés par des activités industrielles et réduire la mobilité des polluants.

    ⚡ PASSER À L’ACTION

    Pour vous lancer dans la phytoremédiation, les organismes de recherche comme l’INERIS et le BRGM sont des interlocuteurs privilégiés ainsi que l’ADEME qui finance et anime des projets dans le domaine. Les acteurs suivants peuvent être des ressources :

    • ADEME

    • INERIS

    • BRGM

    • UPDS

    • UPGE

    • Les établissements publics fonciers (EPF) peuvent également vous accompagner pour ce type de projet.

    ℹ️ AUTRES INFORMATIONS

    Cette fiche a été réalisée à partir de la fiche ID friches très complète sur la phytoremédiation, au sein du Guide de fiches pratiques “Quels usages alternatifs pour les friches ?”, que nous vous invitons à consulter pour plus de détails.

    Les phytotechnologies regroupent un ensemble de techniques qui utilisent des espèces végétales pour extraire, immobiliser ou dégrader des polluants organiques ou inorganiques. D’une manière générale, les composés inorganiques sont immobilisés ou extraits alors que les composés organiques sont dégradés.

    Selon le métabolisme de la plante, différentes stratégies de phytoremédiation sont possibles :

    • La phytoextraction
    • La phytostabilisation
    • La phytovolatilisation
    • La phytodégradation

    L’infographie du CEA illustre ces différentes techniques.